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Urgences pénales

Ouest-France. Justice. « Un coup de couteau pour un rétro, c’est absurde »

Publié par OUEST-FRANCE le 18/08/2021, par Samuel NOHRA

Le tribunal correctionnel de Rennes a décidé, ce mardi 17 août, de renvoyer à l’instruction criminelle l’affaire concernant le coup de couteau au thorax, reçu par un homme de 53 ans jeudi dernier à Saint-Erblon. À l’origine, un simple différend routier qui a dégénéré.

« On ne s’embrouille pas avec ma femme, on ne touche pas à ma femme… » Dans la salle du tribunal correctionnel de Rennes, ce mardi 17 août 2021, cet homme de 27 ans tente d’expliquer ce qui s’est passé le jeudi 12 août, à Saint-Erblon, près de Rennes. Ce jour-là, après un banal différend de circulation, un homme a reçu un coup de couteau en céramique au niveau du thorax. La lame n’est passée qu’à quelques centimètres de son cœur.

« L’effet de groupe m’a fait peur »


« Ma femme m’a appelé et elle m’a dit qu’elle avait été frappée et qu’un type vandalisait la voiture. Il y avait mon bébé de 4 mois à l’intérieur », explique le prévenu. Il sort alors, torse nu, de sa maison, en prenant un couteau de cuisine en céramique et se dirige vers l’endroit où se trouve sa femme. À quelques dizaines de mètres de là. « J’ai vu un groupe de personnes et ma femme hurlait. L’effet de groupe m’a fait peur. Ils se sont approchés de moi. » Il assène un coup de poing au visage de la victime de 53 ans, puis un coup de couteau au thorax. « C’est le bras que je visais. Je suis désolé. » Quelques minutes plus tard, il quitte les lieux en voiture avec sa femme et va se réfugier dans l’appartement d’une amie à Rennes.

Il sera interpellé le lendemain par les gendarmes et placé en garde à vue. Il comparaissait ce mardi pour violence avec usage d’une arme, ayant entraîné chez la victime une incapacité supérieure à huit jours.

« On lisait la haine dans ses yeux »

« Pourquoi ne pas avoir simplement demandé des explications aux personnes qui étaient devant vous ? » demande la présidente. Le prévenu s’en tient à sa version. « Ils étaient agressifs. » Une version démentie par la victime. « Quand il est arrivé, il s’est dirigé vers moi. On lisait la haine dans ses yeux. Sa femme lui a alors dit que ce n’était pas moi l’agresseur, mais mon fils. Il est alors allé vers mon fils et je me suis interposé. » Puis, le coup de couteau est parti.

À l’origine de ce qui aurait pu être un drame fatal, un banal défaut de priorité. Le fils de la victime, qui circulait à scooter, se voit refuser la priorité par une conductrice près de son domicile. Il se porte au niveau de la conductrice et s’en plaint. Cette dernière, selon les témoignages, s’énerve, l’insulte et lui crache au visage. En réponse, il donne un coup de poing dans le rétroviseur, puis se dirige vers le domicile de ses parents. La conductrice le suit et appelle son mari qui habite juste à côté.

« Il va se monter un film incroyable »

« Un coup de couteau pour un rétro, c’est totalement absurde », a estimé le procureur de la République, en préambule de son réquisitoire. « C’est aberrant… » Il évoque un homme « qui va se monter un film incroyable et qui n’est pas venu pour discuter, mais avec un couteau dans la main, derrière son dos, alors qu’il n’y avait aucun danger. À aucun moment, sa femme n’était en danger. » Le procureur rappelle aussi les antécédents judiciaires. Une peine de dix mois de prison pour une affaire de stupéfiants et une procédure en cours pour des violences en réunion sur une femme. Il requiert une peine de prison de six ans, dont quatre ans ferme.

« On cherche à comprendre là où il n’y a rien à comprendre, plaide Maître Thibault Normand, l’avocat de la défense. Il a eu un comportement irrationnel par peur pour sa femme. Le résultat d’un appel à l’aide et d’un danger imminent qu’on lui présente et qui est inexistant. Il croyait sincèrement qu’elle était en danger. On ne peut pas réduire cet homme à cette violence brutale. Il a perdu pied. »

Mais le tribunal n’a pas rendu son jugement, à l’issue d’un long délibéré. Il a donné droit à la requête, en début d’audience de Maître Maxime Tessier, l’avocat de la partie civile, demandant la requalification des faits en tentative de meurtre. « Mon client a été victime d’une agression d’une violence inouïe, il aurait pu perdre la vie. » L’affaire pourrait donc se poursuivre devant la cour d’assises d’Ille-et-Vilaine.